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la liberté d'expression est considérée, par les juristes comme la première des libertés individuelles; à juste titre, car sans elle, les autres libertés ne pourraient pas exister durablement. Elle est la base essentielle de l'Etat démocratique. La liberté de la presse au sens large et, plus généralement, la liberté de la communication sont les corollaires de la liberté d'expression.
Les médias, qui sont le véhicule principal de la liberté d'expression, se trouvent donc au cœur même de la problématique de la gouvernance: en tant qu’objets, sujets et acteurs. La société leur impose un cadre juridique, plus ou moins favorable à la liberté d'expression; ils s'organisent eux-mêmes pour défendre leur crédibilité (codes de déontologie, observatoire de la presse, autorégulation) et ils participent à des campagnes de soutien à la gouvernance
La prééminence de la liberté d'expression parmi les autres libertés individuelles ne va pas sans ambiguïtés pour les médias. Tel journal qui publie des pages entières sur les droits de l'homme (en collaboration peut-être avec des ONG locales ou internationales) peut lui-même être en délicatesse avec la liberté d'expression (silence sur certaines affaires) ou corrompu. Telle radio nationale, en croyant informer dans le sens de l'intérêt général, attise des conflits locaux, etc. Telle la langue d'Esope, les médias sont capables du meilleur et du pire.
Le pire, Radio Mille Collines au Rwanda en est devenue le symbole universel. Pendant la récente crise à Madagascar des dérapages se sont produits qui auraient pu conduire à des situations semblables. Ces scandales cependant ne doivent pas faire oublier que les radios de proximité sauvent des vies pratiquement chaque jour en désamorçant des conflits ignorés du reste du monde.
En fait la liberté d'expression est un idéal dont la réalité s'approche plus ou moins bien par des consensus fragiles, des compromis délicats, des reculs et des victoires provisoires. Chaque fois que les juristes et les journalistes suisses discutent de la liberté d'expression, ils la disent menacée; alors imaginons sa précarité en Asie centrale par exemple! Dans ses contacts avec les terrains, il est à craindre que la DDC soit le plus souvent confrontée avec la mal gouvernance, plutôt que la bonne gouvernance, des médias. Mais pour faire avancer efficacement la cause de la gouvernance, elle se doit d'adresser la question des médias, aussi imparfaits soient-ils, tel le marin qui prend la mer comme elle vient. Comment espérer atteindre, dès lors qu'ils ont une certaine ampleur, des objectifs de participation, de développement équilibré hommes/femmes, de transparence, de respect de l'Etat de droit et d'émergence de la société civile, sans introduire d'une manière ou d'une autre la dimension média? |
